Chine: Les nombreux visages de la répression de la minorité ouïghoure
Par Nelly Guidici
Les Ouïghours seraient plus d’un million à être placés de force dans des camps d’internement dans le Xinjiang, au nord-ouest de la Chine, selon des ONG comme Amnistie internationale. La répression touche également la diaspora ouïghoure dès que des critiques, à l’encontre du gouvernement chinois, sont émises à l’extérieur des frontières du pays.
Au nombre de 12 millions, les Ouïghours constituent la plus grande minorité de la Chine. Ce peuple turcophone de confession musulmane sunnite vit principalement dans la région autonome du Xinjiang, au nord-ouest du pays. Il en représentait d’ailleurs 48,5 % de la population totale en date d’août 2018, selon l’ONG Chinese Human Rights Defenders (CHRD).
Immense territoire de 1,7 million de kilomètres carrés situé aux confins de l’Asie centrale, le Xinjiang est économiquement indispensable au gouvernement chinois : son sous-sol regorge de ressources naturelles comme l’or, l’argent, le charbon et le pétrole. La région fait aussi l’objet d’une politique de sinisation et d’immigration de la part de l’ethnie Han, majoritaire au pays. Le Xinjiang est aujourd’hui l’objet d’une colonisation économique et culturelle accélérée ; les principaux postes au sein du gouvernement provincial sont occupés par des Hans.
« Tous les citoyens qui n’apprennent pas la langue dominante sont traités comme des citoyens de seconde classe et ils sont économiquement défavorisés », explique Anne Sainte-Marie, responsable des communications du chapitre canadien d’Amnistie internationale, en précisant que ce contexte a provoqué « des réactions très fortes ». Des Ouïghours ont ainsi commis une vague d’attentats ciblant les Hans, dont ceux sur la place Tian’anmen à Beijing le 28 septembre 2013, dans la ville étudiante de Kunming le 1er mars 2014 et à Ürümqi, la capitale du Xinjiang, le 30 avril de cette même année.
« Le problème, c’est que des personnes qui avaient fait la promotion de la culture ouïghoure de façon pacifiste ont aussi été condamnées à la prison à vie, fait remarquer Mme Sainte-Marie. Le simple fait de valoriser la culture peut valoir une peine d’emprisonnement. » Sous couvert de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme, les autorités chinoises ont effectivement commencé à réguler de manière draconienne les pratiques religieuses, culturelles et linguistiques ouïghoures. Les démonstrations publiques d’appartenance culturelle ou religieuse comme le port du voile ou d’une longue barbe, s’abstenir de boire de l’alcool, de même que le simple fait de parler la langue ouïghoure peuvent être considérés comme les signes d’un comportement extrémiste.
Plusieurs organisations internationales, dont Human Rights Watch (HRW), Amnistie internationale et CHRD, affirment depuis 2017 qu’une campagne de répression systématique et d’internements touchant toutes les franges de la population ouïghoure se déroule en Chine. Amnistie assure qu’une « politique d’assimilation à grande échelle » est en marche.
Le gouvernement chinois ne nie pas qu’il existe sur son sol des camps où un million de personnes sont emprisonnées. Cependant, il prétend que celles-ci y sont dans le but de suivre une formation. Par choix. « Les témoignages que nous avons recueillis montrent que les personnes n’y sont pas de leur plein gré, réfute Anne Sainte-Marie. C’est à nos yeux et au regard des normes internationales tout à fait inacceptable, car les personnes ne sont pas jugées et envoyées de facto [dans ces camps] sans pouvoir contester les raisons de cette punition. »
HRW a présenté de nouveaux éléments de preuves concernant la détention arbitraire, la torture et les mauvais traitements infligés aux musulmans du Xinjiang dans un rapport publié le 9 septembre dernier.
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