Urgence: Grave insécurité alimentaire au Soudan du Sud et en Somalie
Le Soudan du Sud et la Somalie font aujourd’hui face à une situation d’urgence imputable aux guerres civiles et aux sécheresses successives qui privent leurs populations de nourriture. Alors que cette conjoncture a déjà déraciné le quart de leur population respective, presque autant de personnes ont en ce moment besoin d’aide alimentaire dans les deux pays, selon les Nations Unies.
Par Adeline Huar
« Sur le terrain, ils continuent à attaquer, tuer, enlever, violer, détenir arbitrairement et déplacer par la force des civils, pillant et détruisant leurs biens. Six mois après la signature de l’Accord de paix, la stratégie de la terre brulée continue: des civils sont brûlés vifs dans leurs maisons, leur bétail pillé et leurs moyens de subsistance détruits ».
Tel était le triste constat d’Ivan Šimonović, le Secrétaire général adjoint aux droits de l’homme des Nations unies, en février dernier, qui prévenait que la famine s’abattrait sur les populations déplacées si aucun accord de paix majeur n’était respecté entre les parties.
Rappelons que deux ans après son indépendance en 2011, le Soudan du Sud a en effet sombré dans un conflit opposant le président Salva Kiir et son ex-vice-président Riek Machar. Cette rivalité, qui a réveillé des oppositions ancestrales entre les deux plus importantes tribus du pays, a fait tomber la nation naissante dans une guerre civile qui a engendré de sanglants massacres. Malgré le cessez-le-feu signé en août 2015 par les deux politiciens, les exactions se poursuivent et aggravent les déplacements internes et l’insécurité alimentaire déjà présents.
Plus de deux millions de Sud-Soudanais ont été déplacés à l’extérieur des zones d’extrême violence, mais se trouvent malgré tout en situation d’insécurité alimentaire, car tout le pays est actuellement touché par une crise économique qui entraîne l’interruption des marchés. Quant aux populations piégées dans les zones de violence, qui doivent leur survie aux produits d’origine animale, elles perdent souvent leurs troupeaux, qui sont attaqués par des groupes rebelles armés.
Plus à l’est, la Somalie vit une crise attribuable à la guerre civile et aux pressions régionales et internationales. Depuis la chute du dictateur Mohamed Siad Barre en janvier 1991, le pouvoir et l’armée sont aux mains de diverses factions militaires qui ne s’entendent pas. Plus de vingt années de guerre civile combinées à l’absence de structures étatiques ont créé une situation propice au développement du terrorisme international, incarné dans la région par le groupe Al-Shabaab, affilié à Al-Qaida.
En empêchant la production agricole locale et l’aide humanitaire d’atteindre les villes, Al-Shabaab aggrave une situation endémique de famine qui avait déjà fait 260 000 morts en 2012. Les interventions humanitaires demeurent dangereuses pour les acteurs sur le terrain: au cours des cinq premiers mois de 2015, 60 incidents violents touchant les organisations humanitaires ont été dénombrés par le service de la Commission européenne à l’aide humanitaire et à la protection civile (ECHO).
Même si la situation s’est améliorée ces dernières années, un Somalien sur cinq est aujourd’hui un réfugié ou un déplacé interne. Installés principalement dans le camp de réfugiés de Dadaab, au Kenya, les Somaliens représentent à eux seuls 30% de l’ensemble des réfugiés en Afrique de l’Est. Quant aux déplacés internes, ils représentent plus de deux tiers des personnes en situation d’insécurité alimentaire grave.