Dossier Haïti: Des mois après Matthew, l'insécurité alimentaire persiste
L’ouragan Matthew a frappé les côtes haïtiennes dans la nuit de 3 au 4 octobre 2016. Malgré tous les efforts fournis depuis par les autorités nationales et l’assistance de la communauté internationale, la situation alimentaire demeure toujours alarmante dans les zones les plus affectées par cet ouragan dévastateur.
Par Anderson Pierre
Plus de 6 mois après l’ouragan de catégorie 4, ses traces sont encore bien visibles : maisons abandonnées, plantations détruites, canal Davezac à Camp-Perrin, qui irrigue plus de 2000 hectares de terres dans le département du Sud, presque bouché par les sédiments... Le bilan initial du passage de Matthew était lourd : 546 morts, 175 000 sinistrés et des dégâts matériels estimés à 2 milliards de dollars – soit 20 % du PIB national – selon le gouvernement haïtien d’alors.
Cinq départements ont été balayés par les rafales, mais trois d’entre eux – La Grand’Anse, le Sud et les Nippes – ont été frappés plus durement. « L’ouragan a affecté sévèrement les productions agricoles et réduit la production potentielle de la saison d’hiver 2016-2017. En moyenne, la surface cultivée a diminué d’un tiers, avec des réductions plus significatives observées dans le Sud, la Grand-Anse et dans les Nippes, qui sont parmi les zones les plus productives du pays », lit-on dans un rapport dressé par la Coordination nationale de la sécurité alimentaire (CNSA) en janvier dernier.
En avril, l’agronome Armel Cazeau, responsable de la CNSA, a déclaré sur la chaîne locale Télé 20 que « 4,5 millions de personnes seraient en situation d’insécurité alimentaire en Haïti ». En 2015, le pays n’en comptait que 3,6 millions, selon une enquête réalisée par la CNSA et le Programme alimentaire mondial (PAM). Malgré tous les efforts fournis par le gouvernement provisoire du président Jocelerme Privert, ceux des différents acteurs internationaux et de la nouvelle administration du président Jovenel Moïse et du premier ministre Jack Guy Lafontant pour venir en aide aux sinistrés, la situation alimentaire se détériore considérablement.
Les interventions dans les zones touchées ont été ralenties par divers facteurs, alors que des endroits reculés dans les mornes n’ont pas été atteints. Un mois après le passage de l’ouragan, le PAM rapportait avoir fourni une assistance alimentaire à près de 400 000 personnes pour soutenir les efforts de récupération du gouvernement. Six mois plus tard, « l’organisation élimine progressivement son opération d’intervention qui a atteint plus de 900 000 personnes », peut-on lire sur son site web.